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Le toba-enenlhet
Données collectées par l’UNICEF.
Données sur la langue
Note : Cette langue ne doit pas être confondue avec le toba(-qom) de la famille guaycuruane. Ces deux langues n’ont aucune parenté.
Noms alternatifs : toba-maskoy, maskoy, enenlhet apayvoma, toba-payvoma, emok, emok-toba, cabanatit.
Note : Dans la littérature l’appellation « toba-maskoy » ou « emok-toba » est la plus courante. Nous suivons ici l’appellation choisie par Melia (2010). Maskoy est l’ancien nom donné à l’ensemble du groupe enlhet-enelhet, repris par certaines communautés pour se désigner à un étranger, mais il aurait une connotation légèrement péjorative. « Enenlhet apayvoma » est l’autodénomination de la langue.
Classification : maskoyane ou enlhet-enenlhet
Note : Le recensement paraguayen de 2002 opte pour une division en deux groupes distincts entre Toba et Maskoy. Pour des raisons pragmatiques le terme « Maskoy » a été donné aux membres de « l’union des 6 peuples qui vivent à Riacho Mosquito et Makha-Nempena » (Unruh & Kalish, 2003). Les 756 Maskoy constitueraient ainsi un groupe ayant abandonné leur langue au profit d’un guarani « enlhetisé » (voir plus bas). Ils seraient de fait une « construction linguistique ». Selon Unruh & Kalish, la distinction entre Toba et Maskoy ne repose sur aucune base ethnologique, mais seulement sur le fait que les Toba parlent une langue « indigène » propre, à l’inverse des Maskoy. Il n’y a pas vraiment d’identité « ethnique » maskoy. La question se pose de savoir si Toba et Maskoy sont un seul et même peuple différencié par leur usage de la langue ou si les Maskoy, qui tous ne se considèrent pas comme Toba mais savent clairement leurs ascendances toba, sanapana, angaité ou enlhet-enxet, sont en fait un nom « fourre-tout » désignant en l’occurrence deux communautés, descendantes de mariages mixtes entre les diverses groupes enlhet-enenlhet, et qui parlent guarani.
Aire géographique : Paraguay, Chaco paraguayen. Dans l’angle sud-est du département Alto Pargauay, au nord de Puerto La Victoria et de Puerto Casado (pour les « Maskoy ») et dans l’extrême nord-ouest du département Presidente Hayes, à la frontière du département Boquerón.
Nombre de locuteurs : Selon le recensement national paraguayen de 2002, cité par l’Unicef, 1474 personnes se déclareraient « Toba » et 756 « Maskoy ». 85% des Toba parleraient toba-enenlhet, soit 1253 locuteurs, mais seulement 2% des Maskoy, soit 12 locuteurs.
Statut de la langue : Pas de statut officiel.
Selon Linguamón : « L’espagnol et le guarani sont les langues officielles du Paraguay. Les autres langues amérindiennes sont considérées patrimoine national mais leur présence est totalement inexistante en dehors de leurs communautés respectives, même dans le domaine de l’enseignement, majoritairement en espagnol »
Vitalité et Transmission :
L’Unesco considère le toba (-maskoy) comme une langue « sérieusement en danger » (degré 3 sur une échelle de 5). En réalité il est extrêmement difficile d’estimer le degré de vitalité de cette langue dans son ensemble à cause de la situation vue précédemment. Une partie de la population a abandonné la langue au profit du guarani, mais pour une autre partie, la langue se maintient dans un usage quotidien. Quoiqu’il en soit, il est probablement légitime de craindre pour l’avenir de cette langue à moyen terme.
Le groupe de travail Nengvaanemquescama Nempayvaam Enlhet des linguistes Ernesto Unruh et Hannes Kalish a mis en place un processus de documentation et de revitalisation du enlhet et des autres langues de la famille enlhet-enenlhet. Pour en savoir plus, voir leur site internet
http://www.enlhet.org/indice.htm
Précisions linguistiques :
Il faut préciser que le guarani parlé par les Toba- Maskoy et les autres populations enlhet-enenlhet n’est pas exactement identique au guarani paraguayen, langue officielle du Paraguay. Il s’agirait d’une variante propre à ces populations, une sorte de « pidgin » de guarani paraguayen et des langues de la famille enlhet-enenlhet. Melia (2010) parle de « guarani enlhetisé ». Selon Unruh & Kalish (1999), il serait cependant une erreur de considérer cette langue comme un « guarani au rabais ». À partir du moment où les jeunes générations actuelles l’adopte comme première langue, il pourrait bientôt devenir une nouvelle langue endogène, un « créole enlhet » de base guarani.
Précisions ethnographiques et sociologiques :
Au début du XXe siècle, les usines de tanin (substance extraite du quebracho) du Chaco ont employé un grand nombre d’indigènes de la région, en particulier des populations enlhet-enenlhet. Le contact avec ces entreprises a entraîné un processus d’acculturation de nombreux groupes enlhet-enenlhet, dont l’identité était systématiquement dévalorisée. Ce mélange des différents groupes de la famille enlhet a joué un grand rôle dans l’abandon de la langue propre au profit d’une langue commune : le guarani « enlhetisé » (voir plus haut). Lorsque les usines de tanin ont dû fermer, les différents groupes se sont dispersés pour aller travailler comme main d’œuvre agricole bon marché dans les haciendas ayant colonisé leur territoire de chasse et de pêche.
Sources
Bartomeu Melià, S.J. 2010. Paraguay in « Atlas sociolingüístico de pueblos indígenas en América Latina », UNICEF. Tome 1, pp 173-195 [08/03/2011]
Fabre, Alain. 2007. Diccionario etnolingüístico y guía bibliográfica de los pueblos indígenas sudamericanos. Consultable en ligne [08/03/2011]
Données collectées par l’UNICEF sur l’enxet sud [08/03/2011]
Bibliographie complémentaire :
Chase-Sardi, Miguel. 1972. « The present situation of the Indians in Paraguay ». In: W. Dostal (ed.), The Situation of the Indian in South America: 173-217. World Council of Churches, Genêve.
Kalisch, Hannes. 2005. “La convivencia de las lenguas en el Paraguay. Reflexiones acerca de la construcción de la dimensión multilingüe del país”. Revista de la Sociedad Científica del Paraguay, 17. 47-83. Accessible en ligne [08/03/2011]
Melià, Bartomeu. 2004. “Las lenguas indígenas en el Paraguay; una visión desde el Censo 2002” in: Joan A. Argenter & McKenna Brown (eds.), On the Margins of Nations Endangered Languages and Linguistic Rights. F.E.L. Bath (England). Pp 77-87.
Unruh, Ernesto & Kalisch, Hannes. 1999. El Paraguay multilingüe. Cuadro de algunas dinámicas lingüísticas. Acción. Revista paraguaya de reflexión y diálogo. Accessible en ligne [08/03/2011]
Unruh, Ernesto & Hannes Kalisch. 2002. Nengvaanemquescama Nempayvaam Enlhet. Strategien zur Strärkung des Enlhet. Mitteilungen der Gesellschaft für bedrohte Sprachen (GBS-Bulletin) 7: 21-34.
Unruh, Ernesto & Hannes Kalisch. 2003. Enlhet-enenlhet. Una familia lingüística chaqueña. Thule. Rivista Italiana di Studi Americanistici 14/15: 207-231.
Voir l’Atlas sociolingüístico de pueblos indígenas en América Latina et Fabre (2007) pour une bibliographie plus complète.
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