Imprimer |
Le luxembourgeois
Données collectées par l’Union Latine qui œuvre à la mise en valeur de l’héritage culturel de ses 37 pays membres.
Données sur la langue
Noms alternatifs : platt, francique, lëtzebuergesch
Classification : indo-européenne, germanique occidentale, moyen-allemand
Aire : Belgique (arrondissement d’Arlon), France (région de la Lorraine, Moselle), Grand-Duché du Luxembourg
Nombre de locuteurs : 600 000
Breton (1994 : 55) propose 250 000 locuteurs. Le site de la Généralité de Catalogne donne 350 000 locuteurs, et M. Rispail (2003) donne 90 % de locuteurs au Luxembourg, soit environ 345 000 personnes, auxquelles il convient d’ajouter de 200 000 à 300 000 locuteurs en France.
Statut de la langue :
Belgique (arrondissement d’Arlon) | Pas de statut officiel |
France (région de la Lorraine, Moselle) | Pas de statut officiel |
Grand-Duché du Luxembourg | Nationale |
Vitalité et transmission
Le luxembourgeois est considéré comme une langue « vulnérable » par l’Unesco, malgré son statut de langue officielle, au Luxembourg. Les variantes du platt mosélan et rhénan, parlées en France et en Belgique, sont classées « sérieusement en danger ».
Médias/ Littérature/ Enseignement
Journaux
Quelques périodiques rédigés en luxembourgeois
Radio/télévision
Radio (une station émet entièrement en luxembourgeois au Luxembourg)
Programmes télévisés (2h / jour et 4h le dimanche)
Livres
Quelques livres édités en luxembourgeois
Enseignement
Objet d’étude obligatoire au Luxembourg au niveau préscolaire et primaire.
Précisions historiques
Un peu d’histoire…
Après une importante romanisation, le Luxembourg est germanisé. Il appartient au IXe siècle à la Lotharingie carolingienne.
- Xe siècle : Le premier Comte de Luxembourg construit un château à Lutzburg.
- 1354 : Le Comté devient Duché.
- 1443-1506 : Le Duché est sous domination bourguignonne.
- 1506-1684 : Le Duché est sous domination espagnole.
- 1684-1697 : Le Duché est sous domination française.
- 1715-1795 : Le Duché est sous domination des Habsbourg d’Autriche.
- 1795-1814 : Le Luxembourg est envahi et annexé par la France.
- 1814 : Après le départ massif des Français, l’allemand est introduit comme langue officielle avec le français
- Au XIXe siècle, de nombreux Luxembourgeois vont émigrer, notamment vers les États-Unis.
- 1815 : Au Congrès de Vienne, le Duché devient « Grand-Duché ». Il est cédé à Guillaume Ier, roi des Pays-Bas. Ce dernier impose le français à côté du néerlandais comme langue de l’administration et de l’enseignement.
- 1820 : Le luxembourgeois acquiert le statut de langue écrite grâce à la publication de quelques créations dialectales.
- 1830 : Un arrêté royal laisse le libre choix aux sujets entre français et allemand.
- 1832 : Français et allemand obtiennent le statut de langues nationales.
- 1834 : Français et allemand obtiennent le statut de langues administratives.
- 1839 : La moitié ouest du Luxembourg (le « quartier wallon ») est attribuée à la Belgique lors de la Conférence de Londres. C’est le début de l’unification linguistique autour du luxembourgeois. Naissance du Luxembourg moderne, qui compte alors 175 000 habitants.
- 1842 : Le Luxembourg est intégré à l’Union douanière allemande.
- Autour de 1850 : Développement d’une littérature proprement dite et d’articles de presse.
- 1867 : Le Luxembourg est officiellement reconnu comme un état indépendant.
- 1868 : Le 17/10, la Constitution officialise le libre usage du français et de l’allemand.
- Au XXe siècle, le Luxembourg devient une terre d’immigration et accueille de nombreux romanophones : Portugais, Français, Belges francophones, Italiens, etc. Ils vont représenter jusqu’à 30 % de la population, dont 10 % de Portugais.
- 1912 : Le luxembourgeois devient un objet d’étude obligatoire au Luxembourg ; il est promu par le courant nationaliste à la place de l’ancienne langue officielle (l’allemand).
- 1946 : Apparition d’une norme orthographique.
- 1950-1954 : Parution d’un grand dictionnaire.
- 1971 : Le Luxembourg compte 339 800 habitants.
- 1976 : Le Recueil administratif et économique n° 18 du 16/11/1976 propose une orthographe unifiée.
- 1981 : Le Luxembourg compte 364 600 habitants.
- 1983 : Une grande enquête, menée sur 1000 personnes, porte sur les « habitudes et les besoins langagiers au Grand Duché de Luxembourg » par la Commission ministérielle chargée de définir les objectifs de l’enseignement du français (C.O.F.).
- 1984 : Le luxembourgeois est promu langue nationale par la loi du 24/02/1984.
- 1989 : Le Luxembourg compte 375 000 habitants.
- 1992 : Le Luxembourg compte 389 800 habitants.
- 1999 : La codification de l’orthographe de 1976 est complétée par le Règlement Grand-ducal du 30/07/1999.
Précisions linguistiques
Le luxembourgeois et le français sont les langues officielles du Luxembourg, mais on y parle aussi l’allemand, ainsi que de nombreuses autres langues.
Le luxembourgeois est la langue de la communication avec le français. De plus en plus, les Luxembourgeois emploient la langue dans des contextes formels (comme à la Chambre des députés) alors que cela ne se faisait pas autrefois. Le luxembourgeois est investi de fonctions identitaires fortes.
Le français est une sorte de langue véhiculaire, qui permet de s’adresser à tout le monde sans forcément lier de connivence. Cet usage est lié à la présence de nombreux romanophones (Portugais, Italiens, etc.) pour qui le français est une langue structurellement plus proche de la leur que ne peut l’être le luxembourgeois.
Mais l’allemand jouit d’un certain prestige, notamment à l’écrit (livres, journaux, documents formels), où il domine le français et le luxembourgeois.
L’enquête de 1983 révèle certains usages déclarés.
Le luxembourgeois est utilisé dans les foyers par 80,6 % des sujets contre 12,8 % pour le français. Mais entre amis, le pourcentage de gens s’exprimant en français passe à 28 %. Dans la vie sociale, le luxembourgeois est utilisé par 75 % des personnes contre 33 à 55 % qui disent utiliser le français. Dans la vie professionnelle, le luxembourgeois est majoritaire, devant le français (58,9 %) et l’allemand. L’écrit professionnel se fait d’abord en français, puis en allemand, en anglais et en luxembourgeois. Le luxembourgeois domine dans la vie religieuse et dans la vie politique, il remplit des fonctions identitaires, notamment lors de débats et discours sur la nationalité et l’identité du pays.
Les locuteurs du luxembourgeois disposent d’un répertoire trilingue (francique/français/allemand) qu’ils actualisent en fonction du degré de formalité de la situation, de son support (oral/écrit), mais aussi de la charge affective qu’ils souhaitent lui donner et tout simplement de la situation de discours, face à certains interlocuteurs, en certains lieux (ville/campagne), etc. (Rispail 2003).
Selon J.-P. Goudaillier (1994), il existe bien une certaine insécurité linguistique chez certains Luxembourgeois (qui considèrent notamment leur langue comme un dialecte en regard des langues supranationales que sont le français et l’allemand), mais la coexistence entre les langues est tout de même pacifique. Contrairement à la Belgique ou à la Suisse, on a affaire à un « trilinguisme simultané et non juxtaposé » (Goudaillier 1994 : 7).
Sources et bibliographie complémentaire
Sources et Bibliographie
ACHARD, Pierre (1993), La sociologie du langage, PUF, Que sais-je ?
BAGGIONI, Daniel (1997), Langues et nations en Europe, Payot.
BRETON, Roland (1994), « L’approche géographique des langues d’Europe », in C. Truchot (dir.), Le plurilinguisme européen, Paris, Champion, coll. Politique Linguistique, pp. 41-68.
GOUDAILLIER, Jean-Pierre (1994), « Modification des fonctions des langues en contact et insécurité linguistique : le cas du français en Grand-Duché de Luxembourg », in Michel Francard (éd.), L’insécurité linguistique dans les communautés francophones périphériques, Cahiers de l’Institut de Linguistique de Louvain, Louvain-la-Neuve, vol. II, pp. 7-19.
GOUDAILLIER, Jean-Pierre (1994), « La situation luxembourgeoise : minoration linguistique, valorisation culturelle », in F. Carton et J.-M. Odéric Delefosse, Les langues dans l’Europe de demain, Presses de la Sorbonne nouvelle, pp. 151-160.
GOUDAILLIER, Jean-Pierre (1996), « La situation luxembourgeoise : vers un changement de statut de la langue française ? », in D. de Robillard et M. Beniamino (dirs.), Le français dans l’espace francophone, Paris, Champion, tome 2, pp. 771-783.
JAKOB, Nic (1981), « Sprachplanung in einer komplexen Diglossiesituation dargestellt am Beispiel Luxemburg », in Language Problems and Language Planning, University of Texas Press, vol. 5/2, pp. 153-174.
LAUMESFELD, D. (1996), La Lorraine francique : culture mosaïque et dissidence linguistique, L’Harmattan.
LAUMESFELD, D. (1988), « Esquisse du multilinguisme mosellan », in Langage et Société, 44, pp. 33-51.
LEJOSNE, J.-C. (2000), « Moselle germanophone : des contradictions linguistiques ? », in Passerelles, 17.
REIMEN, Jean-René (1965), « Esquisse d’une situation plurilingue, le Luxembourg », La Linguistique, 2, pp. 89-102.
RISPAIL, Marielle, « Le francique, c’est quoi ? Ou une langue européenne méconnue », in LIDIL, 11 : « Jalons pour une Europe des langues », pp. 41-60.
RISPAIL, Marielle (1999), « Le francique luxembourgeois dans une situation paradoxale de part et d’autre de la frontière : une pratique sans école, une école sans pratique », in LIDIL, 20 : « Les langues régionales : enjeux sociolinguistiques et didactiques », pp. 75-93.
RISPAIL, Marielle (2003), « Contacts entre francique, français, allemand en Lorraine germanophone et au Luxembourg : situations/phénomènes/attitudes », in J. Billiez (dir.), Contacts de langues. Modèles, typologies, interventions, L’Harmattan, coll. Espaces discursifs, pp. 79-90.
Si vous avez des informations complémentaires sur cette langue n'hésitez pas à nous contacter : contact@sorosoro.org